Lia Ianora
Je suis Lia, résponsable Marketing France chez Teamtailor. Je suis particulièrement passionnée par les thèmes liés à l'expérience candidat, à la marque employeur, ainsi qu'à tout ce qui contribue à promouvoir une culture de travail saine et inclusive.
Jeudi 22 juin, on a réuni un panel extraordinaire pour aborder un sujet complexe : la diversité, l’équité et l’inclusion. Chacun de ces panélistes est venu avec une bataille en lien avec la thématique.
Pierre-Arnaud Bouyer est Manager Diversity & Talent Acquisition chez Patform.sh. Il recrute sur 39 pays pour 47 personnalités et sa bataille est le multiculturalisme, ou comment aider des équipes à mieux travailler et s’entendre dans un contexte multiculturel.
Caroline Therwath - Chavier est CEO de The Allyance qui est une entreprise d'expertise sur les sujets de recrutement et de diversité. Sa bataille c’est l’intersectionnalité qui est le fait que quand vous êtes discriminé pour potentiellement plusieurs raisons (homme sans diplôme en situation d’handicap), les discriminations ne vont pas simplement s’ajouter mais vont être amplifiées.
Juliette Delas est Head of SMEs and Community chez 50inTech et leur mission c’est qu’il y ait 50% de femmes dans la Tech d’ici 2050. Pour accélérer les choses, leur objectif est de créer une communauté européenne de femme dans la Tech qui est inclusive avec des hommes et personnes non genrées. Ils veulent faire en sorte que ces femmes se rencontrent et créent leurs réseaux professionnels et faire monter en compétences leurs partenaires sur les sujets de diversité.
Avant de commencer sur la bataille de Juliette, elle nous a donné quelques idées reçues sur ce sujet :
Alors comment se battre contre ces idées reçues en entreprise ?
Avant même de chercher à avoir des femmes dans votre entreprise, il faut avoir une garantie de les attirer, et cette attraction passe par :
Oubliez les offres à rallonges, qui ne sont pas inclusives ou l'on parle de “ninja”, “warrior”, “A player”. Ce sont des termes qui vont désengager les femmes et vous les perdrez dès le début.
Une fois que la candidate intègre le processus de recrutement, il va falloir l’analyser et s’assurer qu’il est inclusif. Si vous mettez votre candidate face à une équipe de recrutement 100% masculine durant l’intégralité du processus, vous risquez de la mettre mal à l’aise, voire de la faire fuir. Incluez des femmes de l’équipe dans vos recrutements, car vous allez rassurer vos candidates et ça marche à l’inverse aussi.
Par exemple : si vous recrutez des profils tech, évitez les assessment live qui ont tendance à déstabiliser les femmes et ce n'est pas représentatif de leurs qualités. Donnez plutôt un délai de 24h-48h pour effectuer l’assessment dans de bonnes conditions à la maison.
Posez-vous des questions : Pratiquez-vous l’égalité salariale ? Facilitez-vous la flexibilité ?
Les femmes sont souvent celles qui s’occupent du foyer et des enfants, donc si vous leur apportez cette flexibilité, vous allez les attirer.
Que faites-vous en interne pour que les femmes soient promues de façon juste, qui font qu’elles vont être payées pour ce qu’elles valent ? Soyez à l’écoute.
Faites un bilan basé sur la data :
Essayez de comprendre quel est l’épanouissement des femmes dans votre entreprise ? Quel est votre turnover au niveau des femmes et à quel âge ? Si vous les perdez au niveau de la maternité, cela signifie que vous avez raté l’onboarding au moment de la maternité.
Faites des audit internes/externes des personnes concernées et être bienveillant.
A l’origine, la diversité, l’équité et l’inclusion est une question de norme et d’éthique. On ne fait pas de la DEI pour lever de l’argent auprès des investisseurs mais on le fait car c’est ce qui permet d’avoir une société plus juste et favoriser la croissance.
L'intersectionnalité met en lumière le type particulier de domination que les membres de groupes situés au croisement de plusieurs rapports de pouvoir subissent : être femme et noire, c'est socialement autre chose qu'être une femme blanche ou un homme noir.
« L’intersectionnalité ne segmente pas les luttes, elle les articule » Sarah Mazouz
50% des personnes en situation de handicap sont au chômage. Quand on sait qu’on est sous tension pour trouver des candidats, pourquoi n’allons-nous pas chercher ces personnes ?
Pour attirer ces personnes sous-représentées, il faut agir et tester des choses qui ont déjà été testées dans certaines structures pour voir si ça fonctionnerait dans vos entreprises.
Ce que Caroline préconise à ses clients, c'est notamment de regarder la sémantique utilisée dans les processus RH. Ça vaut pour le recrutement comme pour les évaluations de performance. Tout ça vous donnera une indication de si vous êtes inclusifs ou non.
Par exemple, Caroline privilégie le terme “parentalité” à “maternité”. Les mots ont une charge, une force.
Les RH et recruteurs sont déjà conscients de tout ça, mais c’est souvent en haut que ca bloque. Il faut donc miser sur la formation.
Le deuxième point est de savoir si votre comex est dilué.
Les équipes RH ont les bonnes idées mais ne sont pas forcément toujours écoutées. C’est une affaire de posture, d’interlocuteur, donc si vous voyez que ça bloque, essayez de trouver la personne qui murmure à l’oreille du CEO ou des alliés au sein de l’entreprise.
Faites également des questionnaires anonymes en interne pour savoir comment vos employés se sentent dans l’entreprise et quel est leur désir de partir. Testez votre entreprise avec le 50inTech score ou un audit The Allyance.
Un conseil qui nous a été partagé par une invitée est l’usage de l’étiquetage.
Il y a parfois des profils de candidat qui peuvent susciter des a prioris et plutôt que de cacher l’élément distinctif, il y a un phénomène psychologique qui s’appelle l’étiquetage.
Exemple : une candidate enceinte, on la présente au hiring manager en lui disant que comme c’est une personne ouverte, alors elle ne verrait aucun inconvénient à rencontrer cette candidate. Et, souvent, ça marche.
On ne vous apprend rien, il existe des différences culturelles entre les pays.
Prenons l’exemple d’un manager Américain vs employé·es Français. Quid du texto à 22h parce que le ou la manager a une idée le vendredi, là où on France on a un droit de déconnexion ? Les comportements américains et français sont différents, et si on ne forme pas au multiculturalisme alors on fait face à un problème de perception “du degré d’investissement” où le manager ne comprendra pas les anciens abus français et la réaction épidermique justifiée de la personne française. Ce problème de perception engendre des conséquences injustes en fonction de ces différences culturelles non discutées, notamment moment de faire les évaluations de l'équipe le manager Américain va se dire qu’il a une partie de l’équipe qui est impliquée et l’autre qui ne l’est pas, ce qui va générer un différentiel de salaire.
Un autre exemple est la prise de parole en public entre intervenants américain et un public d’Asie. En Asie, il y a des codes, des signes de compréhension qui font qu’ils ne prendront pas la parole si on ne leur donne pas explicitement.
Le multiculturalisme, c’est un enjeu qui, s'il est mal géré et mal compris, va générer des incompréhensions, des quiproquos, jusqu’à des problèmes de travail en équipe, et au niveau individuel des injustices ou conséquences graves au niveau des carrières, promotions, rémunérations.
Voici quelques pistes d’actions que vous pouvez mettre en place pour initier le changement :
Cette démarche de faire une enquête anonyme permettra de pointer du doigt des problématiques. Travailler sur ces sujets permettra de prendre du recul et de mettre des actions correctives, en partenariat avec le CSE, et de signer un accord diversité qui permettra d’aller au delà de la loi.
Créez aussi des “employees ressource group” qui sont gérés par des employés. Soyez à l’écoute de ces groupes car ils se sentiront impliqués et écoutés.
Une question pertinente qui nous a été posée durant la table ronde, c’est comment débloquer les mentalités quand une femme a elle même intériorisé le sexisme et trouve ça normal. Mais cette question marche aussi pour les personnes appartenant à un groupe minoritaire qui ont elles-même intériorisé ces discriminations.
Les stéréotypes sont malheureusement imprégnés par les hommes comme par les femmes et combiné au syndrome de l’imposteur dont les femmes sont le plus sujettes, il est important de travailler ce point.
Il faut faire attention avec tout ce qui est en lien avec la DEI à ne pas venir renforcer les stéréotypes sur un individu ou un groupe d’individu.
Quand on ne maîtrise pas un sujet, ce qui compte, c'est d’accepter qu’on ne le maitrise pas. Il y a des gens experts parmi la communauté qui peuvent vous aider, donc ayez soif d’apprendre et lisez, soyez à l’écoute et croyez au pouvoir des interactions.
Au final, la DEI c’est s’acculturer, prendre ce qui est bon partout et ne pas se priver des idées des autres.
Pour terminer la table ronde, on a demandé aux participants de former des groupes de 5 personnes pour réfléchir en équipe à la meilleure action DEI possible à mettre en place en entreprise, sans contrainte de budget. Il y a ensuite eu un vote pour remporter le prix du public et le prix du jury.
Idée de l'équipe qui a gagné le prix du public : mettre en place des objectifs obligatoires pour les managers et les directions qui vont permettre de calculer les bonus et les participations annuelles
Idée de l'équipe qui a gagné le prix du jury : Obliger les entreprises de plus de 50 salariés à avoir une personne responsable de la diversité, de l'équité et de l'inclusion à 100% et utiliser 1% du chiffre d'affaires de l'entreprise pour la mission de diversité.
Crédit photo de couverture : Alexandre Bohin
Juliette Delas, head of SME chez 50inTech est passée dans la Pink Room et a partagé ses meilleurs conseils pour attirer et retenir les femmes dans les entreprises.
Léa Niang nous explique comment le langage inclusif peut favoriser la diversité et l'équité en entreprise et ainsi lutter contre les inégalités. Elle donne également trois conseils concrets pour des offres d'emploi plus inclusives, ainsi que des ressources pour vous aider à adopter le langage inclusif.
Découvrez l'article de Judith Tripard, DRH chez Oh BiBi, sur l'âgisme en entreprise. Qu'est-ce que c'est ? Comment le combattre ? Sensibilisation aux biais cognitifs, valorisation des savoir-faire, lutte contre les discriminations... Retrouvez les solutions pour favoriser la cohésion intergénérationnelle en entreprise dans cet article.